Le beurre, de la traite des vaches à l’assiette : histoire et secrets
Le beurre est indissociable de l’alimentation des Français. Tartiné sur une bonne baguette ou fondu sur des pâtes fraîches, il sublime nos plats et pâtisseries. Mais connaissons-nous réellement l’histoire de cet or jaune si précieux ? Derrière une apparente simplicité se cache tout un savoir-faire ancestral transmis de génération en génération. De la traite des vaches dans nos prairies jusqu’à son incorporation en cuisine ou pâtisserie, nous allons percer les secrets de la fabrication du beurre.
Un peu d’histoire
Contrairement aux idées reçues, le beurre n’est pas apparu avec l’arrivée des Gaulois et de leurs fameuses recettes à base de crème. Dès l’Antiquité, les Mésopotamiens et les Égyptiens s’adonnaient au barattage, ancêtre de nos méthodes modernes de fabrication. Le moule à beurre le plus ancien, découvert en Irlande, date même de 3000 ans avant JC ! Apprécié pour ses vertus conservatrices, ce n’est pourtant qu’à partir du 17ème siècle que le beurre a commencé à détrôner le lard dans les cuisines françaises.
Des Gaulois… aux Gaulois
Revenons un peu plus en détails sur l’histoire du beurre dans nos contrées. Si l’on associe souvent les Gaulois à une consommation importante de produits laitiers, ce n’est en réalité qu’à partir du 17ème siècle que le beurre a commencé à s’imposer dans les cuisines françaises. Pendant longtemps, il a souffert de sa mauvaise réputation auprès des Romains et des populations méditerranéennes, qui lui préféraient largement l’huile d’olive ou le saindoux.
Heureusement, tout finit par rentrer dans l’ordre ! À partir du 17ème siècle, le beurre gagne ses lettres de noblesse auprès des grands cuisiniers et son usage se popularise. La technique de la baratte normande permet d’en produire de plus grandes quantités, transformant petit à petit le beurre de produit rustique en denrée alimentaire premium. Le 18ème siècle voit même apparaître le beurrier, ustensile indispensable sur les bonnes tables.
Une longue bataille contre la margarine
L’histoire du beurre a également été marquée par l’arrivée d’un concurrent de taille à la fin du 19ème siècle : la margarine. Inventée en France en 1869 par Hippolyte Mège-Mouriès pour remplacer le beurre jugé trop cher pour les classes populaires, la margarine va entraîner une véritable crise identitaire du beurre pendant près d’un siècle.
Commercialisée sous des noms fantaisistes comme « beurre végétal » ou « beurre économique », la margarine va peu à peu grignoter des parts de marché au beurre traditionnel, au point même de le supplanter dans certains pays. Heureusement, grâce à l’action de nombreux défenseurs du patrimoine gastronomique français, le beurre a finalement retrouvé ses lettres de noblesse alimentaire et continue de trôner sur nos tables.
Du pré à l’assiette : les étapes de fabrication du beurre
La fabrication du beurre répond à un procédé bien défini, fruit de plusieurs millénaires de savoir-faire laitier. En moyenne, il faut compter 20 litres de lait de vache pour produire 1 kilo de ce précieux produit.
La traite des vaches
Tout commence par la traite des vaches laitières. Effectuée manuellement ou de manière automatisée selon les exploitations, la traite permet de recueillir le lait qui sera ensuite transporté en camions citernes isothermes jusqu’à la laiterie.
L’analyse et le stockage
À son arrivée à la laiterie, le lait est analysé pour s’assurer de sa qualité, puis stocké dans de grandes cuves réfrigérées appelées « tanks à lait ». Cette étape permet de rassembler le lait de plusieurs exploitations avant le début de la transformation.
La pasteurisation
Le lait subit ensuite un traitement thermique appelé pasteurisation. Il est chauffé à 72°C pendant 15 à 20 secondes avant d’être immédiatement refroidi. Ce procédé permet d’éliminer une grande partie des bactéries et autres germes indésirables, améliorant ainsi l’hygiène et la conservation future du produit.
L’écrémage
Vient alors l’étape cruciale de l’écrémage. Le lait est versé dans un écrémeuse, une centrifugeuse qui permet de séparer la crème du reste du lait grâce à la force centrifuge. C’est cette crème qui sera utilisée pour la fabrication du beurre.
La maturation
Une fois récoltée, la crème peut être mise en maturation pendant environ 2 jours. Cette fermentation légère permet de développer les arômes du futur beurre.
Le barattage
Place au barattage ! La crème est placée dans une baratte, un tonneau rotatif muni de palettes. En tournant, les palettes battent la crème, provoquant l’agglomération des globules gras. Petit à petit, des grains de matière grasse jaune se forment : il s’agit des futurs grains de beurre, qui se séparent progressivement du babeurre (petit-lait).
Le lavage et le malaxage
Les grains de beurre sont ensuite récupérés puis lavés à l’eau fraîche pour éliminer le maximum de babeurre résiduel. Enfin, une étape de malaxage permet d’agglomérer les grains entre eux tout en les travaillant pour obtenir une pâte lisse et homogène. C’est à ce moment qu’est incorporé le sel lors de la fabrication de beurre demi-sel ou salé.
Le moulage et le conditionnement
Dernière ligne droite avec le moulage ! Le beurre est pressé dans des moulages en bois pour lui donner sa forme finale de plaquette, motte ou cylindre. Il ne reste plus qu’à l’emballer dans du papier parchemin et une boîte cartonnée avant de le passer au réfrigérateur.
Les différents types de beurre
Au-delà du procédé de fabrication standardisé, il existe de subtiles variations permettant d’obtenir différents types de beurre.
Le beurre de baratte
Issu d’une fabrication traditionnelle en baratte, ce beurre bénéficie d’une texture et d’un goût unique. On le reconnaît à sa couleur jaune soutenue et à son côté très onctueux.
Le beurre pasteurisé
Ayant subi un traitement thermique, le beurre pasteurisé se conserve plus longtemps tout en gardant son bon goût de beurre. C’est le type de beurre le plus répandu actuellement.
Le beurre cru
Le beurre cru est fabriqué à partir d’une crème non pasteurisée, ce qui lui conserve tous ses arômes d’origine. Moins courant et plus délicat à conserver, il reste très apprécié des gourmets.
Le beurre demi-sel
Comme son nom l’indique, le beurre demi-sel contient moins de sel (environ 1%) que le beurre dit « salé » (environ 2% de sel). C’est le compromis idéal pour ceux qui aiment le goût subtilement relevé du sel de Guérande.
Le beurre bio
Sa fabrication respecte le cahier des charges de l’agriculture biologique à toutes les étapes, de l’alimentation des vaches à la transformation du beurre. Un must-have pour les adeptes du bio !
Le beurre AOP
Appellation d’Origine Protégée oblige, ce beurre est produit selon un savoir-faire traditionnel ancré dans une zone géographique précise. Véritable terre d’élection du beurre, la région de Charentes-Poitou compte pas moins de 3 AOP fromagères !
Focus sur 3 régions productrices emblématiques de beurre
Certaines régions françaises ont su se démarquer par leur savoir-faire historicique dans la production de beurre.
La Normandie
On ne présente plus les beurres et crèmes Normands ! Depuis le Moyen-Âge, la Normandie fait figure de leader dans la fabrication de produits laitiers d’exception. Outre la fameuse crème fraîche fleurette, les beurres de baratte comme celui d’Isigny jouissent d’une renommée internationale.
La Bretagne
Avec ses nombreuses exploitations laitières et des pâturages à perte de vue, la Bretagne ne pouvait qu’être une terre de prédilection pour les beurres de qualité. Onctueux et goûteux, le beurre breton se décline sous toutes les formes (demi-sel, salé, extra-fin, etc).
Les Charentes
Dans le Sud-Ouest, le beurre des Charentes (Charente et Charente-Maritime) est tout aussi réputé. Trois AOP consacrent d’ailleurs cette expertise laitière historique : Beurre Charentes-Poitou, Beurre des Charentes et Beurre des Deux-Sèvres.
La cuisine au beurre : conseils, astuces et précautions
Ingrédient phare de nombreuses recettes sucrées ou salées, le beurre demande néanmoins quelques précautions d’usage lors de sa cuisson.
Bien conserver son beurre
- Privilégier un stockage au réfrigérateur, idéalement dans son emballage d’origine
- Sortir le beurre à l’avance pour qu’il ramollisse avant utilisation
- Ne pas recongeler un beurre déjà décongelé
- Vérifier régulièrement l’absence de moisissures (taches bleutées/verdâtres)
Optimiser la cuisson au beurre
- Ne pas dépasser 180°C au risque de le faire brûler
- Mélanger régulièrement la préparation pendant la cuisson
- Ajouter un filet de jus de citron ou de vinaigre pour rehausser les arômes
- Utiliser de préférence une casserole à fond épais pour une diffusion homogène de la chaleur
Associations gourmandes
Voici quelques exemples d’associations réussies avec le beurre :
- Beurre 1/2 sel + crevettes roses
- Beurre salé + pâtes fraîches
- Beurre demi-sel + saint-jacques
- Beurre cru + radis roses
- Beurre BIO + asperges vertes
Le beurre dans la pâtisserie et viennoiseries
En pâtisserie, le beurre tient une place à part. Véritable exhausteur de goût, il apporte du moelleux aux pâtes et viennoiseries en plus de parfumer divinement les préparations.
Pourquoi utiliser du beurre en pâtisserie ?
Contrairement aux matières grasses végétales, le beurre possède des propriétés physiques et gustatives exceptionnelles en pâtisserie :
- Son point de fusion élevé lui permet de gonfler les pâtes à la cuisson
- Sa forte teneur en eau (16%) humidifie les appareils
- Ses cristaux de matière grasse fondent en bouche
- Ses arômes subliment le goût des préparations sucrées
Nos conseils pour réussir ses pâtisseries au beurre
- Privilégier un beurre très froid pour faciliter le feuilletage
- Incorporer le beurre en petits cubes dans la pâte pour un répartir homogène
- Ajouter une noix de beurre dans une crème pâtissière pour plus d’onctuosité
- Parsemer ses tartes aux fruits d’une noisette de beurre demi-sel avant cuisson
Top 5 des pâtisseries préférées des Français
Le beurre se marie à merveille avec de nombreuses pâtisseries et viennoiseries. Découvrez le top 5 des chouchous des Français :
- Croissant
- Millefeuille
- Tarte aux pommes
- Paris-Brest
- Éclair au chocolat
Vous l’aurez compris, impossible de concevoir ces grands classiques de la pâtisserie française sans une noix généreuse de beurre !